L’ancien ministre des Droits de l’homme Joël N’Guessan est accusé d’avoir jeté « le discrédit sur l’institution judiciaire ». Interrogé par un média ivoirien, il s’était inquiété des conséquences de l’inéligibilité de certains candidats de l’opposition au scrutin d’octobre.
L’exclusion des listes électorales de plusieurs poids lourds de l’opposition, dont Laurent Gbagbo et Tidjane Thiam, quelques mois avant l’élection présidentielle d’octobre, n’en finit pas d’agiter la scène politique en Côte d’Ivoire. Après avoir dénoncé leur impossibilité de se présenter au scrutin, l’ancien ministre des Droits de l’homme et ex-porte-parole du parti au pouvoir, Joël N’Guessan, a été placé en détention provisoire, a appris jeudi 19 juin l’AFP auprès de l’intéressé et de source judiciaire.
Ce cadre du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) a été arrêté mercredi pour « discrédit de l’institution judiciaire et des magistrats », a-t-il lui même affirmé. Joël N’Guessan assure avoir été arrêté « par les policiers de la préfecture de police à [s] on domicile au moment où [il] sortait du quartier ».
« On m’a entendu à la préfecture de police hier en présence d’un procureur, et aujourd’hui on m’a déféré devant le procureur de la République qui souhaite m’entendre. Je suis actuellement au parquet », a-t-il précisé jeudi matin. Il a annoncé plus tard être placé « sous mandat de dépôt » en l’absence de son avocat.
Son interpellation a été confirmée jeudi soir par le procureur de la République, Oumar Braman Koné. « Une « information judiciaire a été ouverte avec mandat de dépôt », après des déclarations qui « jettent le discrédit sur des décisions de justice et sur l’institution judiciaire dans son ensemble », a indiqué le magistrat dans un communiqué.
La justice pointe du doigt une interview
Quatre grandes figures politiques ont été déclarées inéligibles à la présidentielle du 25 octobre : Guillaume Soro, Charles Blé Goudé, Laurent Gbagbo et Tidjane Thiam. Des décisions de justice remises en cause par Joël N’Guessan dans une interview accordée au média en ligne ivoirien « lemondeactuel.com » publiée le 17 juin. Il s’y disait « convaincu que l’exclusion de certains acteurs politiques aboutira à une crise au plan national », faisant aussi référence à la crise de 2010-2011. « Si demain, il y a des troubles dans le pays, les premiers responsables, ce sont les magistrats », ajoutait-il.
« Associer le président Ouattara aux décisions des magistrats pour exclure les potentiels candidats, c’est être de mauvaise foi et ignorer le fonctionnement de nos institutions ainsi que la grande liberté qu’elles ont. Donc je le répète, Alassane Ouattara n’est en rien concerné par l’exclusion de certains potentiels candidats, avait-il aussi précisé, tout en appuyant une éventuelle candidature du chef de l’État. Sur le terrain social et économique, tous les Ivoiriens sont d’avis avec moi que le président Alassane Ouattara a fait beaucoup et continue de faire beaucoup pour le pays. »
Selon les articles du Code pénal ivoirien cités par le procureur, les peines encourues pour « jeter le discrédit sur des institutions » peuvent aller de trois à cinq ans de prison.
(Avec AFP)